jeudi 15 juillet 2010

Côtes et entrecôtes (2e de 2)

Donc, disais-je dans la 1ere partie, pas de cols insurmontables : d’autant moins que les trois-villes-clefs de l'Est du Nouveau-Mexique, Albuquerque, Santa Fe et Taos (lieu de villégiature pour les skieurs, et sympathique refuge d'une foule d'artistes qui n'ont pas élu domicile à Santa Fe), sont toutes trois dans la même vallée: celle du Rio Grande.

À mi-chemin entre Santa Fe et Taos, on se met même à le longer, ce fameux fleuve.
Le long de la route 68, vers le Nord. (8 juillet 2010)

Et pendant que moi, je le remontais, d’autres le descendaient.

C'est assez spectaculaire. Rendu là, ça s'appelle la Gorge du Rio Grande et il y a un centre d'interprétation dans le coin, en plus de sentiers, en plus, semble-t-il, d'une autre route pour l'admirer d'un autre angle.

La tache indistincte, à droite, est un vélo De Vinci, à 3500 km de chez lui.

Bon, faut admettre qu'après ce panorama, la route 68 vers Taos s'achève par une montée ardue, mais si elle est ardue, c'est aussi parce qu’on a 100 km derrière la cravate, depuis Santa Fe. Et le jour suivant, en quittant Taos, ça commence tout de suite, non par cette montagne à gravir...
(c'est là qu'est la centre de ski de Taos) mais tout de même par 30 km de montée. En général, une montée progressive, pas du tout abrupte...
(Route 64, entre Taos et Angel Fire, 9 juillet 2010)

... mais j'ai bien dit "en général"... :-)

Jusqu'à la récompense, et ce sera la dernière, promis, je ne vous embête plus avec ça ensuite :
Voilà, c'est fait (9101 pieds = 2770 mètres). À partir de là, c’est « downhill to Montreal ».

Désolé, pas de paysage mémorable ici, et impossible de voir le mât du stade olympique : on est dans la forêt. Pour le vrai sommet, il y a des sentiers de randonnée, dont un qui vous ramènera le long de la crête, si vous avez deux jours devant vous, jusqu'au centre de ski.

Ce matin-là aussi, il y avait un couple de cyclistes habillés en pros. Ils sont arrivés au sommet quelques minutes après moi. J’ai reconnu un couple salué de la main plus tôt, alors qu’ils prenaient une pause à l’écart de la route. Eux aussi, m’apprennent-ils, sont partis de Taos ce matin, et ils y retournent après s’être pris en photo (si ce marqueur prenait un dollar par photo, le Nouveau-Mexique serait riche!).

Ok, et la descente jusqu'aux Grandes Plaines, donc? Eh bien les amateurs de vitesse seront déçus : seulement quelques kilomètres abrupts, avec des lacets qui obligent d'utiliser les freins, après quoi, on est essentiellement sur le plat jusqu’à Eagle Nest, 25 km plus loin (altitude : 2500 m). Ça trouve même le moyen de remonter après Eagle Nest, sûrement dans le but de nous faire admirer le Eagle Nest Lake:

Et ensuite, ça descend (événement historique : j’ai mis mon casque) jusqu’à Cimarron, 30 autres km plus loin (1900 m). Mais par paliers (traduction : petites côtes, longs plats), et sans moyen d’en profiter : gros vent de face (fin de l'événement historique).

Le ralenti n’est pas une mauvaise chose, parce qu'il donne l’occasion d’admirer le canyon de Cimarron dans lequel on a l’impression de s’enfoncer.
Route 64, vers l'Est, entre Eagle Nest et Cimarron. Lieu de villégiature pour de nombreux campeurs et pêcheurs (9 juillet 2010)

Et pour finir la journée, un dernier coup à donner pour se rendre à Raton où, 70 km plus loin... on est toujours à 2000 mètres d’altitude! Au point où on a droit à un avant-goût du Kansas: long et plat!
Route 64, entre Cimarron et Raton, Nouveau-Mexique (toujours le 9 juillet).

Le lendemain, ultime effort : une dernière montée abrupte (2350 m) pour sortir de Raton et du Nouveau-Mexique. Mais en compensation, le Colorado offre un cadeau de bienvenue : une halte routière qui s’ouvre sur le Fisher's Peak.
Halte au bord de l'autoroute 25, quelques km après l'entrée au Colorado (10 juillet 2010)
Il faut se rappeler que dans ce décor rocailleux, hostile et surélevé, au 19e siècle, ils ont réussi à faire passer le train vers Santa Fe. Des amateurs de westerns reconnaîtront le nom du corridor : la « Raton Pass », lieu privilégié pour les guet-apens tendus par de vilains Indiens et de sombres outlaws.

20 km plus loin, on est à Trinidad, Colorado (1900 mètres), où le Pic Fisher est toujours visible...

Et de là, vers Montréal, on dévale enfin ce qui nous reste d’altitude pour pénétrer les longues plaines du Kansas? Eh ben, pas tout à fait : de Trinidad à Dodge City, au centre du Kansas, on met 450 km pour passer de 1950 m à 800 m. Évidemment, à vélo, ça ne paraît pas du tout et si vous avez un vent de face, c’est aussi dur qu’un vent de face dans la très plane Montérégie.

Mais au moins, depuis le panneau 9100, il y a une partie de mon cerveau qui sourit : le plus dur est derrière. La vie a beau être faite de côtes, il y a des côtes qu'on est satisfait de laisser dans le rétroviseur.

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